Analyse d’image : les portraits des candidats à l’élection présidentielle

Avertissement :
Cet article n’a aucune vocation à porter un jugement de valeur ou à véhiculer un message politique. Nous ne ferons pas ici non plus l’analyse technique des montages et incrustations sur des fonds des portraits détourés, ni du changement de couleur des lunettes d’Eva Joly.

Le point commun :
Toutes les images de couverture des professions de foi des candidats à l’élection présidentielle ont un point commun : ce sont des portraits. Élémentaire puisque par le mode de scrutin (suffrage universel direct) et le statut du président dans la vie politique (au dessus des partis), cette élection est le rendez-vous d’une personne avec un peuple. Bémol pourtant, l’arrière plan du portrait de Philippe Poutou laisse voir d’autres personnes en nombre. Mais ces personnes restent floues et non identifiables. Cette présence est cohérente avec son discours qui prône le pouvoir pour la masse des travailleurs.

Les catégories :
On distingue deux grandes catégories : ceux qui sont pris en photo de ¾, qui ont le visage tourné vers la droite et qui (sauf Eva Joly) regardent vers le lointain et ceux qui sont pris de face et qui regardent en face. Ces deux catégories sont également pourvues en candidats.

Ceux qui sont pris de face qui regardent en face :
Dans tous les portraits pris de face, les candidats regardent en face. En effet, une personne prise de face regardant ailleurs serait très mal perçu. On considérerait son regard comme fuyant. Une personne qui a un regard fuyant semble peu sûre d’elle. Au contraire de ceux qui ont une « vision », les membres de cette catégorie regardent le spectateur en face. Ils cherchent ainsi à établir un lien directe avec le spectateur dans la logique du principe de l’élection. Ils s’adressent directement au spectateur et soutiennent leur regard dans une confrontation frontale. D’un point de vue esthétique, cet angle dissimule les traits du visage. Ainsi pas de nez proéminent, ni de menton (trop) volontaire. Chacun propose son fond sans beaucoup de distinction avec les autres candidats.

Ceux qui sont pris de ¾ qui regardent au loin :
Ceux qui sont pris de ¾ présentent tous leur profil droit (leur meilleur?) et regardent tous vers la droite même ceux de gauche. Pourquoi vers la droite ? Notre sens de lecture est de gauche à droite. Nous tombons sur le regard du candidat en premier et nous suivons naturellement la direction de son regard hors de la page. Le regard hors de la page nous permet d’imaginer ce qu’ils regardent et donc d’imaginer ce que l’on veut. Nicolas Sarkozy et Jacques Cheminade, nous donnent une indication grâce au fond de mer et au fond de bâtiment qui se prolongent hors de l’image. Pour l’un c’est un horizon dégagé calme et plat avec du soleil qui se lève. On peut ainsi filer la métaphore du capitaine de bateau qui voit la terre ferme. Pour l’autre, c’est un horizon bouché par un murs de briques, de verre et de métal. Quelle métaphore peut-on filer ? Dos au murs ? Contourner les obstacles ? Raser les murs ?

L’autre point commun est qu’ils ont tous le regard porté vers le lointain. Ils voient loin. Ils semblent voir l’avenir et donc avoir une vision de l’avenir. Leur regard est « visionnaire ». Ce n’est pas une analyse, ni une interprétation mais plutôt une croyance propre qu’ils veulent porter vers cet avenir. Certains voient avec gravité (Jean-Luc Mélenchon et Jacques Cheminade) d’autres voient avec un sourire confiant (Nicolas Sarkozy) voire avec un sourire heureux comme François Bayrou.

Les exceptions à la règle :
Eva Joly. Elle est de ¾ comme les autres mais son portrait est beaucoup plus serré sur le visage et son regard est tourné vers le spectateur de l’image. L’ambiance sombre autour d’elle suggère une certaine intimité. Sa main près de sa joue suppose qu’elle est dans une position confortable propice à l’écoute. Son regard doux et son sourire léger cherchent la sympathie du spectateur. Placée légèrement en dessous du spectateur, elle nous regarde par dessus ses lunettes. A la différence d’autres candidats, elle ne cherche pas à dominer. Elle cherche plutôt la connivence intime avec le spectateur. Les rides accentuées par l’éclairage, les verres « demi-lune », le visage arrondi et les cheveux grisonnants sont autant de traits caractéristiques de l’image d’Épinal de la grand-mère bienveillante ancrée dans l’imaginaire collectif.

L’autre différence notable vient de Marine Le Pen qui est prise de face accoudée sur une table, les bras croisés. Cela lui donne une allure stable et une proximité conviviale avec le spectateur loin des costumes cravate très officiels et très masculins. La tête légèrement dans les épaules, elle ne cherche pas à dominer. Sa tenue simple et sobre montre de l’humilité loin du « bling bling ».

La semaine prochaine, nous ferons un focus sur les portraits des deux finalistes qui se trouvent dans les deux catégories présentées mais qui ont des points communs malgré tout.

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